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Meredith Le Dez : Paupières closes
Poésie (illustrée en peinture par Emmanuelle Boblet)
Les paupières closes, la vie continue. Privé d’informations visuelles, le cerveau se dupe lui-même et s’octroie des prolongations imagées dans un espace-temps que le scientifique qualifiera d’entoptique. Prendre conscience de ce moment particulier qu’est l’avant le noir du sommeil, dans "l’antre" paupière, est un bon moyen de révéler l’incongruité dont on fait preuve à qualifier un instant de "banal". Toute situation vécue en conscience n’est irrémédiablement "pas banale". Et ce n’est pas le moindre des mérites d’Emmanuelle et de Mérédith que de nous en faire là la belle démonstration. La démarche de l’une éclaire la préoccupation de l’autre et les témoignages picturaux jouent des rémanences comme les mots s’abandonnent, hypnagogiques et déjà voilés, halos luminescents des brûlures du réel. S’il fallait accompagner cet ouvrage à deux dimensions d’un apport sonore, un musicien choisirait sans doute de figer treize couleurs de réverbération acoustique, tantôt sombre, tantôt ample comme un soleil frisquet ; tantôt lourde, tantôt charbonneuse comme les secondes d’avant minuit. Feindrait-il lui aussi, de croire que nous pouvons fermer enfin les yeux ? Rassurés que nos perceptions soient pour l’heure partagées ? Prêts à renoncer à la dura lex du réel pour les fragiles rémanences de mystères familiers et bienveillants. Eidola disponibles à tout moment, pour peu que nous ayons la curiosité de prolonger le regard, les paupières closes.
- Pilc
Editions Mazette
www.editions-mazette.fr
