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Carte blanche à Glenn Besnard
Des oreilles dans la ruche. La musique imagée de l’artiste accompagne un film sur les abeilles.
Dans une ruche, les abeilles bourdonnent, bien sûr. Mais si on penche un peu plus l’oreille, on pourrait presque entendre autant de nuances sonores que d’abeilles dans un essaim.
On peut les entendre murmurer le soir lorsque la récolte de nectar a été abondante.
On peut les entendre ronronner, vibrer, parfois même pleurer si la reine, leur mère, venait à disparaître.
On pourrait même les entendre sonner les trompettes quand elles sont en colère ou prêtes à se défendre.
Lorsque j’ai choisi, avec Anne Burlot, de réaliser un documentaire sur les relations que les apiculteurs tissent avec leurs abeilles, nous avions en tête l’envie de retranscrire par l’image et le son toutes les émotions qui nous ont traversés lorsque nous avons ouvert notre ruche pour la première fois. C’est un moment magique qui réveille tous les sens, aussi bien l’ouïe que l’odorat ou le toucher.
Pour ce film, j’ai suis allé capter le son à l’intérieur et à l’extérieur de la ruche, à différents moments de la journée et de l’année.
« Retranscrire en musique
les émotions ressenties au contact des abeilles »
Avec mes abeilles - 2016 © DR
A partir de ces enregistrements et de ces murmures, j’ai essayé de composer une musique instrumentale éthérée et aérienne. Pour chaque séquence mise en musique, j’ai imaginé l’humeur des abeilles. Parfois je me les représentais studieuses et laborieuses, concentrées en plein travail. Parfois je les sentais énervées et agitées ou encore facétieuses, taquines. J’ai eu le sentiment qu’elle pouvait également être mystiques et secrètes. D’ailleurs le son émis par la communauté me rappelle le mantra Om des hindous.
Au Moyen-Age, le chant des abeilles était justement considéré comme sacré. On était convaincu que ces petits êtres portaient en eux une partie de l’intelligence divine. Ce n’est donc pas un hasard si parmi les trois apiculteurs que nous suivons dans le documentaire, il y a Louis-Joseph, frère dans une communauté de Bénédictins. Dans cette abbaye, les moines pratiquent le chant grégorien. J’ai naturellement voulu rapprocher le chant sacré de l’abeille du plain-chant. C’était une évidence. Bien qu’agnostique, j’ai ressenti les mêmes émotions en écoutant les chants liturgiques des moines que le chant des abeilles.
Les abeilles sont vraiment fascinantes. Pour mieux rendre compte de leur majestuosité, nous les avons filmées au ralenti - à une vitesse jusqu’à cent fois plus lente que celle de l’œil humain. Si on peut ralentir l’image sans l’altérer, on ne peut en revanche pas ralentir le son sans le déformer. Il a donc fallu recréer un univers sonore pour toutes ces séquences filmées au ralenti. Comme retranscrire la richesse sonore d’une ruche n’est pas forcément simple, j’ai pris le parti de mettre en musique ces moments où le temps semble suspendu. L’idée étant d’offrir des respirations au film et de permettre aux spectateurs d’apprécier les abeilles au delà de leur qualité de pollinisatrice ou de productrice de miel.
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Glenn Besnard a débuté comme opérateur son pour Radio France. En 2009, il se détourne des ondes pour se rapprocher du spectacle vivant et de la musique. Il a travaillé avec plusieurs compagnies ou artistes comme Mariana Caetano, Gazibul, ou encore Bumpkin Island qu’il a fondé en 2009 (en concert le 1er décembre 2017 à la Citrouille). L’artiste compose également à travers son projet solo øllø. Il a, entre autres, composé la bande originale du dernier film de Dominique Philippe : Le Bateau ivre.
Avec mes abeilles est programmé en novembre dans le cadre du Mois du film documentaire. Le Cri de l’Ormeau a alors eu envie de donner la parole au créateur de l’univers sonore du film pour vous permettre de découvrir en salle une œuvre audiovisuelle... avec une oreille éclairée.
Le film est également visible à tout moment sur le webmédia KuB.
http://glennbesnard.com